A Bordeaux, les journées européennes du Patrimoine sont l’occasion de découvrir le tombeau oublié de Michel de Montaigne (1533 – 1592), ancien maire de Bordeaux, figure éminente de la littérature et de la philosophie françaises. Alors que la mémoire collective avait perdu trace de sa sépulture, l’équipe scientifique du musée d’Aquitaine et son directeur, Laurent Védrine, l’ont redécouverte emmurée dans les sous-sols du musée en 2018 à l’aide d’une caméra filaire.
Cette vidéo est pour moi l’un des plus émouvants souvenirs de mon mandat d’adjoint d’Alain Juppé en charge de la culture et du patrimoine.
À l’issue d’une étude scientifique, nous pouvons aujourd’hui affirmer « à 80 % » qu’il s’agit bien de l’illustre Bordelais. Et cela pose une nouvelle question, de nature politique cette fois : qu’allons-nous faire de cette découverte ?
Avant 2018, une rénovation du musée d’Aquitaine était à l’étude. Ce projet me semblait être l’occasion d’honorer une promesse non tenue par la municipalité à la fin du XIXe siècle : réaliser un tombeau à la hauteur de l’héritage intellectuel du philosophe, en aménageant une salle ouverte au public dans les sous-sols du musée. La nouvelle municipalité semble avoir abandonné ce projet.
Après ces journées du Patrimoine, la sépulture de Montaigne sera-t-elle de nouveau inaccessible, dans les sous-sols du musée ? Ce serait inacceptable car son œuvre est un trésor de la pensée humaniste, de la réflexion sur la condition humaine et de la tolérance intellectuelle. Ses idées sur la diversité culturelle, la relativité des coutumes et des valeurs, ainsi que sur l’importance de l’introspection et du doute méthodique ont eu un impact profond sur la philosophie occidentale.
En 2023, les Essais de Montaigne sont d’ailleurs entrés au Registre international du patrimoine mondial de l’Unesco.
C’est la raison pour laquelle je proposerai lors du prochain Conseil municipal que la salle aménagée autour de son cénotaphe soit agrandie et accueille une exposition permanente sur l’œuvre et l’héritage du philosophe avec comme pièce centrale une copie de l’exemplaire de Bordeaux des Essais*. De plus, puisque régulièrement le nom du musée « d’Aquitaine » est questionné, une commission scientifique pourrait se saisir du sujet avec pour objectif de faire mention, notamment, du nom du philosophe dans une nouvelle dénomination du musée.
Enfin, j’écris ce jour au président de la République pour que Michel de Montaigne soit honoré à sa juste valeur en étant inhumé au Panthéon. Ainsi, la France enverrait un message puissant sur l’importance du dialogue interculturel et de l’humanisme dans notre société. Cela serait une reconnaissance méritée pour un Bordelais dont l’influence perdure à travers les siècles.
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* Car l’original, conservé dans la collection patrimoniale de notre bibliothèque est trop fragile pour être longuement exposé.
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